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"J'ai posé ma tête, maintenant j'écoute mon corps."

Comment prendre mes décisions et faire mes choix ?




Je m'assoie et m'apprête à partager un peu de mes compréhensions. L'énergie qui me touche est douce, c'est de la joie! À peine amorcé, ce geste porte déjà plusieurs choix et décisions. Le percevoir comme un plaisir résulte de mon choix de perception. Je décide que ce contexte qui traverse ma vie est une opportunité, je décide de m’en saisir avec joie. Aujourd’hui je suis responsable de ma perception !


Il m’a fallu quelques décennies pour apporter de la conscience et de la maîtrise dans mes choix.

Mais avant d’en arriver là, il m’a fallu quelques décennies pour apporter de la conscience et de la maîtrise dans mes choix. Prenons du recul et repartons au début de ce fameux chemin, celui que je connais le mieux et que je continue à comprendre, pas à pas, de compréhensions en apprentissages. Au début de cette histoire, je suis né d’une mère délaissée par son jeune mari, n’ayant reçu que l’attention que pouvait lui offrir sa mère, veuve avec trois enfants à charge. Et d’un père, fils de militaire, brûlant d’une énergie puissante et de beaucoup de noirceur, énergie brute et brutale pesant fortement sur son environnement proche.

Si je replonge si loin, jusqu’à la source de mon chemin, c’est parce que la façon dont je prendrai mes décisions et orienterai mes choix vient de là. Comme la plante qui sort de terre est sensible à la qualité de l’humus, à l’humidité, aux nutriments et autres éléments influant sur sa croissance, tels que l’ombre et la lumière, le petit être s’adapte, se faufile et déploie son énergie pour percer la croûte de terre. À peine sorti, il est déjà « constitué » de cette expérience. Ses besoins sont satisfaits, ne le sont que partiellement ou ne le sont pas du tout. Mais le petit être survit parce qu’il s’adapte.

Tourmenté par ses propres manques, mon père, mon héros, ne pouvait répondre à ma soif d’attention. Ses énergies comprimées et compressées éruptaient parfois, frustrations puissantes et colères fracassantes. En manque d’attention depuis son plus jeune âge, puis déjà seule en pleine maternité, ma mère était blessée et manquait de ressource pour exprimer un amour maternel dont elle ne possédait pas les codes. Nul doute que tous deux, mes géniteurs, ont fait de leur mieux.

Ceci est mon terreau. De là, puis d’autres expériences de vie, est née mon énergie, celle qui a façonnée une grande partie de ma vie. En prenant la mer, j’ai pris le large, énergie de fuite. Fuir la culpabilité de l’entre deux, balloté entre ma mère et mon père, les tensions et parfois la violence de chaque passage de l’un à l’autre, le déchirement des uns et des autres est trop lourd. Prendre le large, loin de tout cela. Et puis me surpasser, briller pour, peut-être, capter l’attention de mon père. Dans mon histoire, sortir du cadre et adopter un cheminement atypique a été, pour l’enfant que j’étais, un instinct de survie.


Tout mon parcours de coureur au large a été conditionné par une succession de choix et de décisions qui tendaient à répondre à cette énergie de fuite et ce besoin de briller. La couleur même de mes navigations, empreintes de risques et d’extrémisme a été celle qui me semblait pouvoir attirer « l’œil » de mon père. En rédigeant ces lignes, je conscientise encore un peu plus que mon style de vie n’a été qu’à l’image de ce que mon mental m’indiquait de faire pour répondre à ce besoin d’exister dans son regard. Ainsi, j’ai participé à des victoires autour du monde, j’ai battu des records à la voile qui subsistent aujourd’hui. D’un certain point de vue, on peut dire que j’ai accompli, que j’ai réalisé. Je suis devenu un navigateur hors pair doté d’un savoir-faire exceptionnel !

Mais mon savoir-être, comment se portait-il pendant que le savoir-faire creusait son sillon ? Devenu père, ai-je été à la hauteur de ce que moi, enfant, j’attendais ? Ai-je été le père présent que j’aurais désiré avoir ? J’étais marin, donc absent ! Finalement, cherchant à combler des manques d’enfance, je me suis peu à peu installé dans une hérédité de blessures familiales.

Au début de ma carrière, seuls mes résultats me servaient de marqueurs pour valider ma performance. La joie, l’équilibre familial, mon bien-être et celui de mes proches ne rentraient pas dans l’équation. Puis peu à peu, d’ébranlement en questionnement, de démâtage en chavirage, d’homme à la mer en hélitreuillage, j’ai commencé à écouter. Depuis longtemps déjà, mon instinct me disait « la vie te parle », mais mon mental persistait dans sa démarche de fuite en avant et de besoin de briller, sans pour autant combler mes manques.  Mes besoins et blessures d’enfant ne trouvaient ni satisfaction ni guérison. Pour qu’enfin je l’écoute, qu’enfin je relève la tête et ouvre mon regard, la vie a tapé fort, à la hauteur de ma propre intensité. Mésaventures et drames m’ont enfin ébranlé dans ma course haletante. Respire…


Aujourd’hui, je comprends le cadeau de la vie qui a su m’arrêter sur cette piste sans issue. Aujourd’hui, j’ai conscience de la mainmise de mon mental sur mes choix et décisions. Il m’aura fallu tant de temps pour ébranler cette énergie engrammée dans le terreau de mes jeunes jours !

Mon corps l’a compris avant ma tête, il a senti que l’heure avait sonné de s’arrêter et de faire le point. S’en est alors suivi un moment de solitude et de perte de repères, je ne savais qu’une chose (dans ma chair), la voie que je poursuivais était sans issue, je ne faisais pas route vers la lumière. Cette phase a été importante car elle a amorcé un changement dans mon fonctionnement : ne plus suivre les dictats de mon mental et de mes pensées mais m’ouvrir à ce que je ressentais, m’écouter enfin. Il m’aura fallu presque 50 ans de vie pour faire le choix de partir à la rencontre de mon être.

Voilà peut-être une décision qui venait du cœur, de la profondeur de mon être. Qui étais-je, je ne le savais pas, mais ce « JE » a repris la main ! Ici a commencé un chantier, celui de ma guérison. Retour vers la réalité, compréhension de mes dénis, prise de conscience de mes besoins, acceptation de mes manques, bref un gros chantier !

Je ne maîtrisais encore pas tout, mais je ressentais de la fierté envers moi-même, je reconnaissais le courage qu’il me fallait pour changer de fonctionnement, pour me transformer, je commençais simplement à m’aimer, à comprendre que ce que je cherchais à l’extérieur avec tant de force était peut-être là, à l’intérieur.

Le niveau de mes prises de décisions, et de choix, a évolué. De ma tête, il est peu à peu descendu vers mon buste. De décisions pensées, j’ai évolué vers des choix sentis. Dans ce processus de transformation, je suis passé de perfectionniste à optimaliste.  J’ai compris que l’idéal état illusion et qu’il me contraignait à l’insatisfaction, tandis que l’optimal était plus réaliste et qu’il me proposait de faire avec ce que j’avais vraiment en mains. Il me permettait d’accepter mes manques, mes fragilités, bref de m’accepter dans ma réalité de l’instant. Petit à petit, mes choix ne se sont plus construits sur une fiction écartelée entre le passé et le futur, ils se sont mis à jaillir du présent : ce fameux ''ici et maintenant''.

Maintenant, quand je me tourne vers l’intérieur… je me considère. Par ce geste, je me pose la question : « Comment est-ce pour toi ? ». Un dialogue naît entre mon esprit et mon corps. De chair, d’os, de sang et de viscères, mon corps vit dans le présent, les deux pieds sur la terre, pendant que mon mental fabrique un flot de pensées toutes moins ancrées et plus illusoires les unes que les autres. En me tournant vers l’intérieur, j’habite mon véhicule, je m’installe dans la réalité matérielle de ma vie. De ce dialogue, se construit peu à peu une connivence, comme une sensation de me re-trouver.

Il y a une petite « gymnastique » que j’aime faire. Je l’appelle le jeu des affirmations. Je ferme les yeux en prenant quelques secondes pour bien ressentir mon état intérieur, puis j’affirme « je suis un être humain ». Je constate alors ce que cela engendre dans mon corps, j’enregistre ce scan interne. Puis j’émets cette nouvelle affirmation : « Je suis un être vivant ». Les sensations corporelles se modifient (en ce qui me concerne), je ressens comme un léger crépitement de joie, ma ''couleur intérieure'' change. Lorsque je me considère en être vivant, mon lien avec le Vivant se rappelle à moi. Tout d’un coup, mon regard s’ouvre, comme si j’ouvrais le diaphragme. Je comprends que ma vie ne se borne pas à des frontières familiales, ancestrales ou culturelles, mais qu’elle s’inscrit dans cette grande ''magie'' de la vie. 

Je me pensais en manque d’attention, de soutien, et même d’amour. Et je découvre que je fais pleinement partie d’un grand système fourmillant, celui de la vie sur terre ! J’ai ma place, elle existe belle et bien ''ici-bas''. Je descends de mes pensées pour me poser les pieds sur terre. Cette fameuse ''terre mère''. Celle qui, inconditionnellement est et sera toujours là pour me soutenir, me supporter. Cela a comme un air d’amour maternel, d’amour matriciel.

Me suis-je égaré dans des considérations philosophiques ? Sommes-nous toujours dans le sujet de la prise de décisions et des choix ? Oui je crois, toujours en plein dans le sujet, car à partir de maintenant je prends conscience qu’une grande partie de mes décisions, pour ne pas dire l’ensemble, était lié à une dynamique ancrée dans mon enfance et dans les quelques déséquilibres qu’elle contenait.  Maintenant, ma conscience est ''avertie'' de ce fonctionnement adapté à mon contexte de début de vie. L’adaptation est l’un des principes de base du vivant (Darwin parlait d’évolution), alors cette prise de conscience me confirme mon appartenance au vivant, à la vie, à quelque chose de plus grand que moi.


Le vivant se questionne-t-il sur ce qui est juste ? Un arbre se pose-t-il la question : « suis-je à ma juste place ? » 

Ici commence une nouvelle façon de partir à la recherche de la décision ou du choix « juste ». Quelle est cette nouvelle justesse qui remplace mon ancien mode de fonctionnement basé sur une ''soumission'' à mon mental ? Le vivant se questionne-t-il sur ce qui est juste ? Un arbre se pose-t-il la question : « suis-je à ma juste place ? » En vérité, je n’en sais rien ! Mais on peut croire que non, il ne se pose pas de question. Il vit, simplement. L’arbre est donc à sa juste place. Pour les peuples racines, qui vivent au plus proche de la nature, la question du sens que nous Occidentaux nous posons… n’a pas de sens ! Pour eux, le sens de la vie est de vivre, ils sont comme l’arbre.

Ce concept de juste place ou d’action juste ne serait peut-être qu’un concept humain, handicapé par un cerveau trop performant dont il ne connait pas suffisamment le mode d’emploi, au point d’en être presque ''l’esclave''. Pour l’illustrer, j’aime cette expression du langage commun : « je me prend la tête ». Autrement dit, mon cerveau ou mon mental génère tant de pensées que je ne vis plus, à l’image d’un homme qui prend sa tête entre ses deux mains comme s’il tenait un fardeau.

Après presque 50 ans de prises de décisions sans conscience de la mainmise de mon mental, j’apprends maintenant à écouter ce que me dit mon corps plutôt que ma tête. Quand une décision m’allège, ou « m’enlève du poids sur les épaules » je sais qu’elle est dans le sens de la vie, que cette décision me permet d’occuper ma place dans le vivant. Ce ressenti d’allègement est réel, il est direct, sincère, authentique. Il n’est pas alambiqué ou chargé de considérations compliquées comme l’hypothétique questions « que vont en penser les autres ? ». Cet allègement sur mes épaules est simple, comme une tension musculaire qui s’atténue ou disparaît. La réaction de mon corps est en lien direct avec ce qui est juste pour moi, ici et maintenant. Pourquoi ne pas écouter cette information qui est là, juste là, en moi ?!

Il me reste quelques lignes, pourquoi ne pas les utiliser pour vérifier que mon témoignage écrit répond à ce que je souhaitais partager ?

Je descends en moi, respire doucement, et y rencontre la légèreté. Ainsi ma décision est prise, c’est le point final.



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